Grand Paris / Boulogne: balade architecturale autour des années 30 à proximité du bois.

Située sur l’axe Versailles – le Louvre, Boulogne-Billancourt a longtemps été scindé en deux entre Boulogne au Nord, riche, princier et lieu privilégié par les artistes, et le Sud ou se concentrait le long de la Seine dans le quartier de Billancourt les usines et les quartiers plus populaires.

Cette balade se propose de découvrir différentes réalisations marquantes des années 30 au Nord de ce territoire. Compte tenu de la richesse du patrimoine architectural et urbanistique d’autres balades compléteront celle-ci.

Deuxième ville d’île de France après Paris sur le plan démographique, l’urbanisation de Boulogne-Billancourt a pris forme dans les années 30 en phase avec les courants architecturaux de l’époque et grâce à l’encouragement de clients audacieux et libres d’idées préconçues. Souvent issus d’une élite artistique, regroupée autour du marchand d’art Daniel-Henry Kahnweiler et ses riches heures des « dimanches de Boulogne« . Ces clients firent confiance à de jeunes architectes se réclamant de l’avant-garde, de la tradition voire du néo-classicisme qui ont apporté une diversité et une richesse digne d’intérêt à cette ville.

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La balade débute route de la Reine, après avoir passé le stade du Parc des Princes dans la rue de la Tourelle. Plusieurs extensions et surélévations récentes de maisons individuelles sont en continuité avec l’habitat mixte existant: immeubles et hôtels particuliers des années 30.

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A l’angle rue des Princes – rue de la Tourelle, un groupe de 5 immeubles d’habitations desservis en cœur d’îlot par un ensemble de rues et de petites places ( C.Lefranc Arch.1929-1931).

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Ce groupe présente des similitudes par rapport aux ensembles HBM des boulevards des ceinture parisiens. Pour cet ensemble immobilier construit pour une compagnie d’assurances la brique et l’enduit sont utilisés sur l’espace intérieur, les façades sur la rue de la Tourelle sont en pierre de taille.

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Plus loin à l’angle avec la rue du Belvédère la hauteur de cet ensemble est réduit pour s’aligner avec les premières villas particulières mitoyennes et assurer une transition dans l’échelle du bâti. Le traitement des bow-windows et des balcons dégage une impression de vigueur.

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Plus loin au n°52 de la rue de la Tourelle: structure en béton pour cet immeuble en pierre de taille d’une apparence très classique (U.Cassan Arch.1924).

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En revenant au n° 5 de la rue du Belvédère, cet hôtel particulier à la façade concave ( R.Bornay Arch.1928-1929) est d’un esprit néo-classique avec son attique, il dialogue avec la maison Godfray au n°4 dont la façade convexe suit le tracé de la rue (R.Fischer Arch.1927) dont le traitement plus moderne gommant toute référence au classique.

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Au n°9 le traitement de la façade sur rue avec sa grande baie vitrée surmontée d’une pergola signale cette résidence-atelier d’artiste (A.Lurçat Arch.1926-1927) construite à l’origine pour le sculpteur Froriep de Salis.

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Au n°21 la villa Dora Gordin (A.et G.Perret Arch.1929), la structure en béton apparent clairement exprimée est surmontée d’une corniche classique avec remplissage des allèges en panneaux de briques appareillées. La grande baie de l’atelier occupe toute la largeur de la façade sur rue, la façade sur jardin dessert les pièces privées. Une autre villa des frères Perret pour Marguerite Huré située au n°25 a été grandement remaniée.

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D’autres villas modernistes des années 30 ou des ré-interprétations contemporaines ponctuent la balade dans la rue du Pavillon et le quartier des Princes-Marmottan.

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Place de l’Europe, face aux stades du Parc des Princes et Jean Bouin, à l’angle au n°1 rue du Pavillon et 32bis rue de la Tourelle, sur une parcelle triangulaire (M-V.Guilgot Arch.1937) cette villa se développe entre des courbes concaves et convexes, seule la corniche vient rompre l’aspect dépouillé des façades

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Au n° 24 rue Nungesser et Coli, l’immeuble collectif de la Porte Molitor (Le Corbusier Arch.1933-1934). L’immeuble construit sur ce terrain traversant (12 m x 26 m) a développé le principe des planchers libres (incluant 5 poteaux entre les façades sur les 2 rues) aménagés par les occupants. Le plan en H reçoit 14 appartements sur 7 étages, éclairés par 2 cours intérieures. Aux 7é et 8é étages l’appartement-atelier a double orientation de Le Corbusier est implanté avec son toit jardin face au Parc des Princes ( visitable sur RdV avec la Fondation Le Corbusier). Un immeuble d’un modernisme plus radical que l’immeuble mitoyen du n°22 réalisé par M.Roux-Spitz .

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n° 24 rue Nungesser et Coli: (J.Fidler et A.Poliakoff Arch.1932).

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Au n°20 rue Nungesser et Coli, sur un terrain traversant (J.Fidler  Arch.1930) et dans un style éclectique cet immeuble utilise les reculs d’alignement par rapport aux 2 rues pour développer avec 2 arrondis des jeux de gradins ( légèrement différemment dans le traitement des balcons et des balustres sur la façade donnant rue de la Tourelle).

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A l’angle avec la rue du Château deux ensembles de logements pour la Caisse des Dépôts et Consignations se font face (L.Faure-Dujarric Arch.1934-1936) dont l’un occupe tout l’îlot. Façades en béton revêtues de pierre et percées de baies identiques, les derniers niveaux sont dotés de terrasses donnant vers le Bois de Boulogne.

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On reprend ensuite la rue de la Tourelle pour observer les autres façades des immeubles construits sur les terrains traversants avec la rue Nungesser et Coli, au n° 15 ( J.Fidler Arch.1930).

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n° 19 rue de la Tourelle ( J.Fidler et A.Poliakoff Arch.1932): un jeu de volumes simples et massifs reprenant le principe des bow-windows rabattus à 45°.

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Au 23 rue de la Tourelle la façade arrière de l’immeuble de Le Corbusier. Les 10 chambres prévues à l’origine pour les domestiques sont implantées en RdC et en Sous-sol. Comme sur la rue Nungesser et Coli: structure en béton armé façade de verre et acier, et briques de verre.

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Au n°24 les ornements en céramique de cet immeuble (G.Moreau Arch.1913) attirent l’attention ainsi que le gabarit particulier de cet immeuble entouré d’autres constructions de styles éclectique ou régionaliste.

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On emprunte ensuite rue Maurice Loyau jusqu’à l’avenue Robert Schumann, au 19bis  l’hôtel particulier de la famille Renard (J-L Courrège Arch.1926-1929) est un exemple d’architecture d’Art Déco de tendance régionaliste. Grands versants de toitures en tuiles de Bourgogne avec de hautes cheminées, en façades des alternances de briques et de pierres sculptées. J-L Courrège très intéressé par les arts décoratifs a construit plusieurs hôtels pour le Touring Club de France (notamment ceux d’Auxerre et d’Aix en Provence).

 

Cet hôtel particulier comporte deux grands appartements, André Malraux a occupé le duplex du premier étage de 1945 à 1962.

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En face au 18bis avenue Robert Schumann: l’hôtel particulier Dujarric de la Rivière (L.Faure-Dujarric Arch.1930) présente une image différente marquée par la sobriété. Ici tout concoure à mettre en valeur la salle qui accueillait l’orgue de la propriétaire sur deux niveaux.

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Détail du portail d’entrée rue Salomon-Reinach.

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La rue Salomon Reinach aboutit rue Denfert-Rochereau, au n°5 l’immeuble de rapport (G-H Pingusson Arch.1933-1936).

A l’origine Le Corbusier avait élaboré un projet en 1923 réalisé en 1926 l’appartement- atelier d’artiste des Ternisien sur ce terrain en pointe assez difficile. Des problèmes financiers, la mise en œuvre de procédés nouveaux et les modifications pour s’adapter aux différentes contraintes aboutiront à de multiples malfaçons, s’en suivirent revente et destruction. C’est alors que G-H Pingusson, un proche de R.Mallet-Stevens réalisa sur cet emplacement un immeuble de rapport de 3 petits appartements par étage autour d’un escalier hélicoïdal. Pingusson a conservé la pointe en RdC du bâtiment de Le Corbusier et édifié cet immeuble aux hublots et à la proue arrondie du style « paquebot », source d’inspiration en vogue à cette époque de développement des grands transatlantiques.

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Dans l’allée des Pins deux autres résidences ateliers par Le Corbusier: les villas des sculpteurs Miestchaninoff et Lipchitz (1924).

Aux n°8, 6 et 4 de la rue Denfert-Rochereau: les villas Collinet, Cook et Dubin forment un ensemble d’une grande unité architecturale, excepté une surélévation récente. Ces trois villas mitoyennes ont été édifiées entre 1926 et 1927 respectivement par Mallet-Stevens, Le Corbusier, et R.Fischer.

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La Villa Collinet réalisée en 1926 est un prélude à la villa-atelier que réalisera Mallet-Stevens dans le 16e arrondissement notamment pour les frères Martel. Ici Mme Collinet a loti le terrain d’origine en 3 parcelles de 10 m de large, la profondeur des terrains a permis  de profiter de jardins à l’arrière des constructions. Cette première réalisation a définie les alignements et les hauteurs qui ont ensuite été respectées par les 2 autres villas. Le volume de l’escalier en extrémité légèrement avancé par rapport au plan carré d’étage de la villa permet de caler la composition de l’ensemble. Béton blanc et façade dépouillée sans décoration rapportée en façade, le jeu des volumes sert de contrepoint à une certaine rigueur formelle de l’ensemble. Au RdC les pièces de service, au premier étage les pièces de réception et au dessus les chambres qui donnent sur le toit terrasse. En façade arrière un haute verrière éclaire le salon-atelier.

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Villa Cook: pour ce journaliste américain Le Corbusier applique ici en 1927 ses certitudes de « l’architecture nouvelle« : construction sur pilotis libérant le sol, toit jardin, plan et façade libres, fenêtres en longueur coulissant latéralement. Le  plan classique est renversé: le rez de chaussée est libre et la réception sur le toit permet de découvrir le Bois de Boulogne. Par rapport à la villa Collinet Le Corbusier affiche son appartenance au « style international » avec les fenêtres en bande continue au nu extérieur de la façade.

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Villa Dubin (R.Fisher Arch.1928), même déclinaison d’une façade en béton lisse et toit terrasse malheureusement modifié au dernier étage par une extension en 1964 réalisée par le propriétaire, ancien président de l’UNSFA et de l’Ordre des Architectes.

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A l’angle avec les rues Denfert-Rochereau et Gambetta, face au carrefour des Anciens- Combattants l’hôtel particulier de J.Niermans (1935). Les deux façades sont traitées de façons différentes. La façade coté jardin rue Denfert-Rochereau est d’une mise en scène assez classique avec un escalier monumental compte tenu du faible recul par rapport à la rue.

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La façade sur la rue Gambetta se distingue par une multiplicité d’ouvertures de dimensions variées.

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n°5 rue Gambetta, hôtel particulier ( E.Terry y Sanchez Arch.1928-1931). Pour cette réalisation l’architecte s’inspire assez librement des styles dits « historiques » notamment de Palladio et de Ledoux (le soubassement massif avec fruit) pour réaliser un « collage anti-moderne » assez décomplexé.

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Du coté des numéros pairs de la rue Gambetta deux immeubles collectifs autour d’une cour ouverte ( M.Julien et L.Duhayon Arch.1933-1934).

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A proximité: les hôtels particuliers des 8-14 rue Gambetta ( M.Julien et L.Duhayon Arch.1933): béton désactivé en façade et une imposante corniche souligne le toit terrasse. .

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n°4 l’hôtel particulier de l’architecte A.Gutton (1928-1930), auteur notamment du plan d’urbanisme de reconstruction de Boulogne en 1948.

Sur le terrain du n°2 rue Gambetta, face au carrefour des Anciens-Combattants, et 1 avenue J-B Clément: la résidence atelier pour le peintre M.Lombard, l’un des décorateurs du paquebot Normandie (P.Patout Arch.1928). L’atelier du peintre est implanté dans la pointe et face au rond point, les accès sont reportés sur les façades latérales. Conçu sur un plan maçonnique, le soleil devant briller sur la table de salle à manger à toute heure de la journée.

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Façades des hôtels particuliers coté rue JB Clément.

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Au n°3 avenue J-Clément (L.Compoint Arch.1928-1929), motifs sculptés et frontons Art Déco pour cet immeuble qui vient s’insérer dans le plan masse de Julien et Duhayon vu précédemment.

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Cette balade se termine avec au n° 25 les immeubles de la France Mutualiste qui se prolongent sur la voie privée Pau-Casals ( Bénier Arch.1933) le traitement des cages d’escaliers sont assez représentatifs de l’Art Déco.

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